Zones industrielles : une révolution en marche

D’ici à 2030, Genève aura transformé les espaces dédiés aux industries en écoParcs. Une première suisse! Pour y parvenir, le canton mise sur l’industrie 4.0 et une gestion participative des activités sur site. Meyrin, Vernier, Vernets, Acacias, Plan-les-Ouates et Satigny sont les principales communes concernées.

Dossier rédigé par Fabio Bonavita | GHI | 07.03.2018

De la ferraille, des poids lourds, des amoncellements de déchets, cette image des zones industrielles appartiendra bientôt au passé. Place aux écoParcs! Leur particularité? Ils visent à concilier l’activité économique à la protection de l’environnement et à la qualité de vie. Un projet ambitieux qui devrait se terminer en 2030.

Ecologie industrielle
Faisant de Genève le premier canton suisse à concrétiser une telle révolution. De quoi réjouir Yves Cretegny, directeur de la Fondation des terrains industriels (FTI): «Le but de cette démarche est de garantir une viabilité économique des entreprises et la diversité des emplois tout en permettant une utilisation maîtrisée du territoire et des quartiers industriels de qualité. Par le biais de notre fondation, des partenariats sont conclus entre les entreprises, les communes et la collectivité afin d’améliorer la qualité et les impacts environnementaux de ces zones.»
Pensées dans leur globalité, et non plus parcelle par parcelle, les écoParcs privilégient désormais les entreprises qui font le choix de l’écologie industrielle. En améliorant, par exemple, la gestion de leurs déchets. Ou en installant des serres sur les toits. Une mutation qui enthousiasme Alexandra Rys, membre de la direction de la Chambre de commerce, d’industrie et des services de Genève (CCIG): «Pour les entreprises, ces changements constituent une opportunité de repenser leur modèle d’affaires et leur chaîne de production. Des regroupements d’activité peuvent intervenir. Il est également possible de rendre les zones plus vivantes et de limiter les flux de trafic.»

Poids économique
L’enjeu est de taille puisque le secteur industriel genevois concentre 68’000 emplois et 16% du PIB cantonal. Il englobe notamment l’horlogerie, la mécatronique, les sciences de la vie, la chimie et les technologies de l’information et de la communication. Pour Yves Cretegny, cette diversité implique de miser sur le collaboratif: «Il faut créer des espaces de rencontres pour que les entreprises échangent et apprennent à se connaître. C’est le but de la plateforme GENIE.ch qui organise périodiquement des ateliers thématiques. Cet outil permet de trouver la bonne personne dans l’entreprise voisine afin de lancer des projets communs.» Comme un espace de restauration ou un parking. Une vision en adéquation avec l’industrie 4.0 qui permet justement une mise en réseau des processus en s’appuyant sur la numérisation.

Second souffle
Question calendrier, les écoParcs du Bois-de-Bay à Satigny, de Plan-les-Ouates et de Riantbosson à Meyrin, disposent déjà de leur commission. Ceux des Batailles, de Zimeysa, de Mouille-Galand et la future zone d’activités mixtes de Meyrin-Satigny devront attendre 2019 pour voir les premiers effets concrets de cette mutation permettant aux zones industrielles de retrouver un second souffle.


Zones industrielles: «A Genève, ces zones doivent se moderniser!»

INTERVIEW • Antonio Hodgers, conseiller d’Etat en charge du Département de l’aménagement , du logement et de l’énergie (DALE), précise les ambitions cantonales en faveur des futurs écoParcs.

GHI: Quels sont les principaux enjeux des futures zones industrielles genevoises?
Antonio Hodgers: Celles du canton doivent se moderniser! Ces écoParcs sont maintenant réfléchis et planifiés de manière beaucoup plus qualitative. Les zones industrielles sont fondamentales pour notre économie puisqu’elles accueillent aujourd’hui des milliers d’entreprises, ainsi que les emplois et les places d’apprentissage qui vont avec. Il est donc prioritaire qu’elles soient agréables à vivre pour ces employés et performantes pour les entrepreneurs. Les activités des zones industrielles devront dans ce cadre se développer en particulier avec une emprise moins forte au sol, celui–ci étant devenu plus rare et plus cher.

GHI: Concrètement, quels vont être les bénéfices de ces mutations pour les entreprises?
Anotonio Hodgers: Le but est de favoriser la collaboration et l’émergence de projets interentreprises. Les entreprises trouvent ensemble des solutions à des problèmes quotidiens communs: récolte des déchets d’entreprise, partage d’une chaudière, installation de panneaux solaires pour un réseau de production d’électricité local, meilleure mobilité en rationalisant des places de parking existantes ou en participant à des parkings mutualisés, mise à disposition de services communs pour les employés (restauration, crèches, etc.).

GHI: Certains affirment que le canton fait oeuvre de pionnier. Vous confirmez?
Anotonio Hodgers: Genève est effectivement précurseur en la matière! Nous avons deux moteurs: la Constitution genevoise qui fixe la mission de l’écologie industrielle et la Fondation pour les terrains industriels (FTI) qui doit mettre en oeuvre ce principe et qui joue le rôle de facilitateur entre tous les acteurs.

Antonio Hodgers

Pour le conseiller d’Etat Antonio Hodgers, l’écologie industrielle doit faire partie des priorités cantonales.


ÉDITORIAL: Courage, changeons!

Franchement, transformer les zones industrielles du canton est une démarche courageuse (lire cicontre). D’abord, parce qu’elle n’est pas du tout électoraliste. Ensuite, quand on pense industrie, on a tous en tête l’image de grosses machines tournant à longueur de journée dans un bruit assourdissant. Un peu comme dans le film Les Temps modernes de Charlie Chaplin.

Quelle grave erreur! A Genève, on a compris que changer ces zones grisâtres en écoParcs est une opportunité unique. Pour y parvenir, la Fondation pour les terrains industriels de Genève (FTI) s’appuie sur les principes de l’écologie industrielle. Dans la pratique, l’accent est mis sur la mutualisation des ressources. L’eau rejetée par une entreprise pharmaceutique est, par exemple, réutilisée par une PME active dans la construction. Les solvants et les acides sont recyclés et bénéficient d’une seconde vie. L’énergie est également économisée.

Ces initiatives permettent de faire baisser la consommation globale du secteur industriel. Et Genève est le canton suisse le plus avancé en la matière. Grâce à des acteurs locaux impliqués et une volonté politique sans faille, cette mutation avance à un rythme soutenu. Chapeau!