La FTI : le bras tendu de l’Etat

La Fondation pour les terrains industriels de Genève (FTI), entité de droit public, a pour mission de valoriser le foncier industriel. En clair, elle facilite l’implantation et le développement des entreprises du secteur secondaire dans le canton, en mettant l’accent sur l’écologie industrielle.

Rédaction CCIGinfo | Mars 2021

Ses activités s’inscrivent dans un cadre légal (la LFTI) qui définit clairement son périmètre d’intervention. En outre, depuis 2014, elle est dotée d’une Convention d’objectifs, établie avec l’Etat. Celle-ci constitue une feuille de route des éléments fondamentaux de la politique voulue par le Conseil d’Etat et détermine les moyens à mettre en œuvre, en fonction des réalités. Les terrains industriels que la FTI gère sont privés, propriété des collectivités publiques (canton ou communes) ou lui appartiennent en propre.

Des objectifs ambitieux
Arrivé en décembre 2019 à la présidence du Conseil de fondation de la FTI, Guy Vibourel a dû «apprendre un nouveau métier: celui de loueur, agenceur de DDP* et, d’une manière générale, de solutionneur de problèmes fonciers». À son arrivée, deux tâches l’ont surtout occupé : réfléchir à la vision de la FTI jusqu’en 2024 et rechercher un nouveau directeur, qui s’est incarné en la personne de Guillaume Massard.
La nouvelle Convention d’objectifs, couvrant la période 2020-2024, « est très ambitieuse, commente le président de la fondation, et suppose une action extrêmement volontaire ». L’exiguïté du territoire pousse à réfléchir sur de nouvelles manières de faire afin de rendre les zones industrielles plus économes et plus vivables, et afin qu’elles deviennent des lieux de vie ouverts aux autres. Actuellement, elles emploient plus de 70 000 personnes et sont responsables d’environ 15% du PIB genevois.

Un « partenaire évident »
Tous les yeux sont bien entendu tournés vers le secteur Praille-Acacias-Vernets. Pour Guy Vibourel, la Fondation PAV (FPAV) est « un partenaire évident », même si les tâches sont clairement réparties: rachat des droits distincts et permanents (DDP) pour la FPAV et élaboration de solutions pour la relocalisation des entreprises concernées pour la FTI. «Notre philosophie de travail est inchangée, dit-il, et notre rôle d’accompagnateur des entreprises va continuer. » Une Convention de collaboration doit être signée ce printemps encore entre la FTI et la FPAV. De plus, cette synergie se traduira même, d’ici la fin de l’année, par un regroupement des deux fondations et de la Direction PAV dans les mêmes locaux à l’avenue de la Praille.

Dans le périmètre PAV, l’un des problèmes les plus épineux est celui de la valorisation des travaux réalisés par les entreprises au bénéfice d’un DDP. La politique de la FTI est constante en la matière et les possibilités de valoriser des travaux strictement définies. «Cette politique ne va pas changer, dit Guy Vibourel. Toutefois, les coûts encourus par l’entreprise seront pris en compte dans les solutions de  déménagement qui lui seront proposées. » En fait, ajoute Guillaume Massard, « il y a une seule équation financière : combien le DDP est-il acheté et combien coûtent le déménagement et les nouveaux locaux. »

Sept nouveaux lieux identifiés
« L’une des difficultés, c’est qu’on ne peut pas empêcher une PME d’investir dans son outil de travail, alors que ce bien ne doit pas être trop valorisé avant le déménagement prévu ». En tout, sept nouveaux lieux de transfert ont été identifiés avec l’Etat, dont trois sont prioritaires: les Cherpines à Confignon, les Rouettes à Bernex, les Communs à Vernier. Pour le reste, ce sont les actuelles zones industrielles qui seront densifiées. « L’idée est de mutualiser les surfaces. Avec le télétravail et le progrès technologique, la demande en m2 par activité diminue. Il y a aussi davantage de projets au financement mixte, public et privé », explique Guillaume Massard.

« Nous ne sommes pas le bras armé de l’Etat comme le pensent certains, relève pour sa part Guy Vibourel. Je dirais plutôt le bras tendu de l’Etat. Et nous souhaitons que les communes se réapproprient aussi les zones industrielles. »

En bonne place des préoccupations de la FTI : trouver les moyens d’offrir des loyers accessibles aux TPE et aux artisans. «Non seulement cela fait partie de nos missions, dit Guy Vibourel, mais les privés ne sont pas forcément en capacité de proposer des locaux adéquats pour ce type de besoins. » Une tâche d’identification des besoins certes complexe, mais qui peut satisfaire chacune des parties, si l’on veille au maintien de prix concurrentiels. Reste encore la détermination du moment auquel entamer les démarches auprès des entreprises, largement dépendant de la progression des projets d’aménagement et du déroulement du processus.

L’écoParc, l’avenir de la zone industrielle ?
En termes de développement durable appliqué aux zones industrielles, Genève s’est montrée pionnière depuis 2004. « On a d’abord parlé d’écologie industrielle, désormais on parle d’économie circulaire ou d’économie de la fonctionnalité. Mais, fondamentalement, il s’agit de concepts apparentés et complémentaires », précise Guillaume Massard. Dans cet esprit, la FTI pilote la transition des zones industrielles en écoParcs, qui répondent aux défis de durabilité et d’exigüité du territoire cantonal.

Pendant des décennies, les zones industrielles étaient en effet des territoires dotés de hangars servant à des activités secondaires lourdes. Les écoParcs, eux, sont des structures conciliant l’activité économique avec son environnement par une optimisation des infrastructures et des ressources (mutualisation) en respectant la qualité de vie, la qualité des emplois ainsi que la qualité environnementale générale du canton.

Parmi les exemples de mutualisation, on peut citer le partenariat avec SIG, qui permet à la FTI de co-investir dans le solaire à l’attention des entreprises, en mutualisant certaines toitures photovoltaïques. Au lieu que ces sociétés investissent dans des réseaux énergétiques séparés, la FTI souhaite par exemple proposer des raccordements à des infrastructures mutualisées. Le financement des équipements qu’elle effectue est alimenté par une dotation étatique de la FTI et par des taxes perçues auprès des entreprises.

Réfléchir en termes d’écoParc implique aussi de revoir la gouvernance, dans le sens d’une plus grande implication des différentes parties prenantes (FTI, commune, entreprises, voire représentants des employés). Actuellement, la ZIPLO (à Plan-les-Ouates) est la zone industrielle la plus engagée dans cette démarche. Gageons que les dizaines d’autres suivront son exemple.

La zone industrielle de Plan-les-Ouates (ZIPLO), l’un des sites les plus dynamiques du canton où intervient la FTI (Photo : Thierry Parel)


Un directeur multifacette

Guillaume Massard

Guillaume Massard, 42 ans, a pris ses fonctions à la direction de la FTI le 1er octobre 2020, après un recrutement étendu sur six mois. Conjuguant un profil d’ingénieur/chercheur et d’entrepreneur, il se dit «motivé à trouver des solutions de relocalisation d’entreprises ou de recherche de locaux. Mon idée n’est pas d’employer la politique du bâton, mais celle de la carotte.»


* Un droit distinct et permanent (DDP) s’apparente à une location sur un très long terme (30 à 100 ans selon le code civil). La mise à disposition d’un terrain en DDP génère une rente annuelle pour le propriétaire du terrain. Ce droit est dit «distinct et permanent» parce que le propriétaire du terrain reste propriétaire, alors que celui qui réalise les constructions n’est propriétaire que de ces dernières.


Source : CCIGinfo n°3 – Mars 2021